L’autodéfense, un instrument de prévention à la violence petite histoire...

Corinna Seith/Liz Kelly : "Achievements Against the Grain: Self-defence Training for Women and Girls in Europe." London 2003. 
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Dossier de presse 


L’autodéfense, un instrument de prévention à la violence 

Le concept de prévention à la violence connaît trois modèles. 

Les campagnes de sensibilisation contre les violences faites aux femmes sont un exemple de prévention tertiaire, qui tente de changer les conditions sociales qui facilitent, voire engendrent, la violence. 

La prévention secondaire vise à accueillir et accompagner les victimes - par exemple dans un refuge avec le but d’empêcher une nouvelle victimisation.    
On parle beaucoup moins d’empêcher la violence avant qu’ elle ait lieu: 
C’est la prévention primaire. 
Elle peut prendre deux formes : travail avec les agresseurs potentiels et travail avec les victimes potentielles. 
Tandis que le travail avec les agresseurs potentiels est aujourd’hui intégré à tout plan officiel de sécurité, le travail avec les victimes potentielles – dont fait partie l’autodéfense -  reçoit moins d’attention et de moyens financiers. Sans doute est-ce parce que ceci concerne majoritairement des femmes, des enfants, des personnes âgées, des groupes marginalisés. 

Une petite histoire de l’autodéfense pour femmes 
L’autodéfense pour femmes est née du mouvement des femmes. 
Déjà les suffragettes anglaises avaient appris des techniques de Jiu Jitsu pour se défendre contre les agents de police. 
De même, certaines femmes ouvrières dans les pays germanophones ont appris à se défendre contre des attaques fascistes pendant les années trente. Il s’agissait de rendre les femmes moins vulnérables face à la violence motivée politiquement, mais la violence dans la sphère privée était encore tabou. 

C’est seulement pendant les années soixante et soixante dix que le mouvement féministe met l’accent sur cet aspect. D’abord, on accuse la violence sexuelle, puis la violence conjugale. 

La réponse féministe suit la logique des trois types de prévention : les premiers refuges et lignes téléphoniques (« viol secours ») se créent, les premières manifestations et campagnes contre la violence sont menées. Mais les femmes veulent aussi éviter de devenir victimes. Ainsi naissent les cours d’autodéfense pour femmes, souvent initiés par des femmes actives dans les arts martiaux.  

Ces premiers cours étaient une affaire risquée pour les instructrices, car elles contredisaient la sagesse populaire (et policière) selon laquelle montrer de la résistance provoquerait la mort assurée. Il n’y avait ni modèles positifs, ni études sur les stratégies efficaces. 
Les instructrices étaient convaincues que, comme victimes réelles et/ou potentielles, elles étaient les mieux placées pour développer des méthodes contre la violence. 
Tandis que les préventions secondaire et tertiaire ont été reconnues et imitées par des institutions, l’autodéfense est aujourd’hui une pratique qui, dans la plupart des pays, s’exerce de manière autonome, avec peu de soutien financier politique. 
Ainsi l’autodéfense pour femmes reste inconnue, malgré son potentiel émancipateur. 

En guise de définition La plupart des pays européens ont connu le développement de leurs propres écoles d’autodéfense pour femmes1. Venant du Québec, le Wendo est la technique la plus connue dans les pays francophones. Le Royaume-Uni, l’Irlande, la Suède, la Finlande, la Suisse et les pays germanophones connaissent différentes techniques (Wendo, Model Mugging/Impact américain,°                                                
Seito Boei, écoles ancrées dans les arts martiaux, etc.). Par contre, rien n’existe en Europe de l’Est. 

Les Pays-Bas sont le seul pays à avoir institutionnalisé l’autodéfense, avec un diplôme national d’instructrice et une place pour l’autodéfense dans le Plan d’action national contre les violences faites aux femmes. C’est là aussi qu’ont été développées l’autodéfense pour femmes avec handicap physique et sensoriel ainsi que beaucoup d’autres adaptations à des besoins spécifiques, par exemple pour les petites filles, les femmes âgées ou les femmes avec handicap mental.  

Les cours de ces différentes écoles d’autodéfense ont en commun les quatre "ingrédients" suivants :  des informations correctes sur les différentes formes de violence , les moyens de les
 reconnaître et prévenir ;  la promotion de la confiance en soi par jeux de rôles, discussions et réflexions ;  des techniques de défense physique simples et efficaces ;  de l’entraînement mental pour intégrer ces nouveaux comportements et attitudes. 

Un stage d’autodéfense a pour objectif d’accroître la confiance en soi et la capacité d’agir consciemment et avec détermination. L’autodéfense se concentre sur l’assertivité et la survie et est basée sur les expériences individuelles et collectives. Toutes ces écoles font une analyse féministe des phénomènes de violence et des inégalités de pouvoir.  

Est-ce que ça marche ? Bien qu’aux débuts quelques études sur l’efficacité des diverses stratégies de défense, surtout contre le viol, ont été menées, le monde académique a largement négligé ce sujet. 

Quelques données disponibles indiquent que les facteurs les plus importants pour mettre un terme à une agression sont: une attitude méfiante, impolie et agressive vis-à-vis de l’agresseur ; l’intervention déterminée et immédiate ; une défense combinant des stratégies verbales et physiques.  Une étude allemande a démontré que, contre le viol, la passivité a un taux de succès de 19%, une défense hésitante verbale ou physique un taux de 78% et une défense active et déterminée de 84%. Si elle empêche l’agression dans un grand nombre de cas, l’autodéfense a aussi le résultat de donner un sentiment d’autonomie et de valeur personnelle aux femmes. 
En offrant des instruments concrets pour être davantage actrice de la situation, l’autodéfense peut aussi contribuer à une meilleure qualité de vie et offrir un espace pour le développement de la solidarité entre femmes. 

Par Irene Zeilinger, Garance asbl Garance organise des stages d’autodéfense et défense verbale pour femmes et filles. Début 2005 paraîtra un guide gratuit de sécurité pour femmes.



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